«La santé numérique est une solution pour l’Afrique.»
Préoccupée par le niveau des soins médicaux en Afrique, le Pass Santé Mousso vient apporter une solution innovante et avant -gardiste. Meilleure initiative santé au Women Community in Africa Summit (WIA 2019), cette start-up s’est ouverte à votre magazine préféré, par le biais de sa première responsable.
Bonjour Corine, pouvez-vous nous présenter votre start-up ?
Le Pass Santé Mousso est une start-up qui évolue dans le domaine de la santé numérique, donc de l’E-Santé. Nous avons mis en place un carnet de santé électronique qui se présente sous forme d’un bijou. L’idée est d’avoir à tout moment sur soi ses informations dans le domaine médical pour faciliter la prise en charge et le suivi médical du patient.
Comment ça marche concrètement pour le patient ? Comment fonctionne ce bracelet de santé ?
Le Pass Santé Mousso pour le patient, est un carnet de santé matérialisé par un bijou. Par contre pour le médecin, c’est une plateforme de gestion sécurisée et de partage d’informations. Alors pour le patient, il suffit de se procurer un de nos médaillons sur lesquels il y a des identifiants qui sont uniques à chaque personne.
Celui-ci doit se rendre sur notre plateforme pour s’enregistrer, en remplissant un formulaire lui demandant d’indiquer son Groupe sanguin, les personnes à contacter en cas d’urgence, ses infections chroniques, ses allergies, etc. On lui demande également de télécharger sa photo d’identité pour que nous soyons rassurés qu’il s’agit bien de lui.
Ces informations utiles de premier secours vont faciliter la prise en charge de ce dernier en cas d’accident. Notre interface est une plateforme de gestion, le médecin prendra alors le patient en charge, tout en ayant accès à ses antécédents médicaux. Du coup, les médecins peuvent se passer les informations du patient, sans avoir à se contacter l’un et l’autre. C’est-à-dire que même si je pars du centre médical de Cocody au centre médical de Marcory, je peux facilement être prise en charge.
Aujourd’hui, quel est l’impact du Pass Santé Mousso en termes de chiffres ?
Le Pass Santé Mousso, ce sont aujourd’hui 48 cliniques conventionnées, une convention avec le ministère de la Santé et de l’hygiène publique et plus de 15 000 utilisateurs. Trois ONG de la santé sont affiliées à notre projet. Mais le véritable impact pour nous, est bien sûr d’avoir réussi à réduire les décès dus aux erreurs médicales. À ce niveau, il n’y a pas de chiffres concrets à donner, parce que cela ne fait pas partie de nos indicateurs. En France, par exemple, c’est 60 000 décès par an dus aux erreurs médicales. Aux États-Unis, c’est la troisième cause de décès après l’AVC et le cancer (25 000 décès par an). Donc allez imaginer ce que ça pourrait donner comme chiffre dans un pays en voie de développement, quand on sait que 70 % des décès aux urgences sont dus aux erreurs médicales.
Comment vous est venue l’idée de créer votre entreprise ?
Le Pass Santé Mousso a été en 2014, à la suite de la survenance d’un événement malheureux. Il s’agit du décès du jeune mannequin Awa Fadiga, qui s’était fait agresser. Il y a eu dans le temps eu une grosse polémique autour de sa mort. Une certaine opinion accusait le corps médical, alors que les médecins qui l’avaient pris en charge n’avaient aucune information sur elle.
Nous avions la possibilité technologiquement parlant de résoudre ce problème. Après lancement de ce projet, au fur et à mesure que nous avancions, j’ai compris qu’il était aussi lié à mon histoire. Enfant, j’étais épileptique, asthmatique et je tombais souvent à l’école sans pouvoir véritablement expliquer ce que j’avais comme mal. C’est donc, pour moi, une manière d’aider toutes ces malades qui risquent de perdre la vie, faute de la méconnaissance de leur antécédent médical.
Depuis 2014 à ce jour, quels sont les challenges que vous rencontrez au jour le jour ?
Le premier a été de convaincre la population de la pertinence de notre produit. Cela n’a pas été compliqué. Après, il a été question de convaincre les autorités administratives et gouvernementales et de les inciter à signer avec nous des conventions de partenariat. Ça n’a pas été une mince affaire de les convaincre du bien-fondé du mariage technologie et santé, mais nous y sommes parvenus. Un autre challenge, gagner la confiance du corps médical qui, il faut le dire, est souvent très conservateur. La déontologie de leur métier n’accepte pas trop le virage au numérique. Mais nous y sommes arrivés à force de persévérance. Nous n’avons pas eu peur d’être rejetés. Aujourd’hui avec la pandémie du COVID-19, on se rend compte de l’importance de notre produit.
Quelles sont les ambitions que vous avez pour Pass Santé Mousso ?
Pour nous, le Pass Santé Mousso doit devenir le carnet de santé par excellence des Ivoiriens. L’Afrique doit être le premier continent en E-santé. Nous pensons fermement que cela est possible aujourd’hui.