Son entreprise joue un rôle des plus importants dans le recyclage des déchets plastiques en Côte d’Ivoire. Rien n’aura été facile pour se faire une place, mais Yaya KONE figure bel et bien parmi les entrepreneurs ivoiriens dont la voix compte. Écoutons-le alors.
Pouvez-vous nous présenter votre entreprise ?
Je suis Yaya KONE, je suis cofondateur de Coliba, une start-up spécialisée dans la collecte et le recyclage des déchets plastiques.
Des entreprises qui font ce boulot, on en trouve de plus en plus, pouvez-vous nous dire en quoi est-ce que votre entreprise est différente des autres ?
Notre approche de la collecte et le recyclage des déchets plastiques est innovante. Nous avons créé une application mobile gratuite et disponible sur toutes les plateformes, qui permet à un ménage de programmer sa collecte de déchets plastiques et de nous contacter pour que nous passions les récupérer. En fonction, par exemple, des bouteilles plastiques que collectera un ménage, il pourra avoir la possibilité de gagner des datas internet, grâce à un partenariat que nous avons avec un opérateur de téléphonie de mobile depuis quelques années. Ce ménage pourra aussi gagner des produits cosmétiques, etc.
Une fois ces déchets plastiques récupérés, nous les envoyons dans un centre de traitement situé dans la commune de Yopougon, à Abidjan. Là-bas, nous donnons une seconde vie à ces bouteilles plastiques. En termes techniques, on dira que nous produisons des paillettes.
Ces paillettes-là, nous les revendons à des industriels qui vont en faire de nouvelles bouteilles ou emballages plastiques.
C’est quoi aujourd’hui l’impact de votre entreprise en Côte d’Ivoire ?
Notre impact est de trois ordres. Nous avons d’abord l’impact écologique ou si vous voulez de la protection de l’environnement. À Abidjan, il y a des tonnes de déchets plastiques produites par jour, par semaine, par mois et par an qui, malheureusement ne sont pas bien gérées. Nous avons apporté une solution qui marche et qui fait ses preuves.
Le deuxième impact relève de la création d’emplois. Nous avons formalisé un écosystème informel jusque-là, en formant des collecteurs d’ordures, afin qu’ils exercent ce métier professionnellement et dignement.
Le troisième et dernier impact, est lié à la promotion du genre. 80 % des personnes qui collectent les déchets plastiques auprès des ménages, sont des femmes. Nous avons eu l’idée de recruter plusieurs d’entre elles.
Nous avons aujourd’hui, après 4 ans d’existence, créé 32 emplois formels et près de 22 milles personnes qui interagissent sur notre application mobile chaque mois. Nous en sommes aujourd’hui à collecter entre 25 et 35 tonnes de déchets plastiques par mois, sachant qu’une tonne de ces déchets fait 33 milles bouteilles. Ce sont des chiffres qui parlent.
Pouvez-vous nous partager le souvenir de votre pire journée en tant qu’entrepreneur ?
La pire journée de ma vie d’entrepreneur, je l’ai vécue en fin d’année 2019. Nous avions à cette période rebrandé l’application mobile, et il y avait tellement de monde sur la plateforme qu’elle a crashé. Pendant que l’opérateur mobile avec lequel nous travaillons faisait son travail de communication pour promouvoir l’application, nous n’arrivions pas à contenir tout ce flux. Ça été une journée très difficile.
Mais il fallait arriver à gérer cette situation avec courage. C’est cela aussi être entrepreneur. Nous avons été francs avec le public, en reconnaissant que nous avions un souci technique avec notre serveur et que dans les 72 heures, le problème sera réglé. Grâce à Dieu, nous avons réussi à résoudre le problème dans les délais que nous avions fixés. C’est le lieu de dire merci à toute notre équipe de développeurs et à tous nos partenaires.
Quelle leçon tirez-vous de cette situation ?
Ce que je retiens de cette situation vécue, c’est qu’on doit prendre toujours soin de vérifier si le service que nous nous apprêtons à lancer ne se retournera pas un jour contre nous. Il faut maîtriser le contour économique, social et psychologique de notre projet avant de se lancer. Cela vous permettra d’être serein, calme et d’anticiper vos crises ou de mieux les gérer.
Quels sont vos conseils à l’endroit d’entrepreneurs qui veulent se lancer ?
Pour toutes ces personnes qui veulent se lancer, je dis qu’il faut dans un premier temps identifier un problème, qu’il faut ensuite chercher à résoudre. C’est une chose qu’on dit tout le temps, mais c’est justement parce que c’est ça le plus important que c’est répété. Après, il faut constituer une très bonne équipe. Celle-ci doit être composée de personnes compétentes, qui épousent votre vision et qui sont aussi rigoureuses que vous. Enfin, il faut avoir un bon mentor et un excellent réseau. Je le dis parce que dans le développement de votre projet, il arrive une période où vous avez besoin de financement pour avancer. C’est ce mentor qui va vous conseiller et vous orienter. Le réseau vous permettra d’avoir une ouverture vers l’extérieur, où vous pourrez rencontrer des personnes qui vont épouser votre idée et vous accompagner. Mais pour arriver à tout ça, il faut de la discipline et du travail.